Le jeune Augustin : un parcours dans les archives blésoises
Fils du « musicien gagiste » de la cathédrale de Blois et donc né dans une maison modeste, Jacques Nicolas Augustin Thierry ne possède pas les deux marques fondamentales pour émerger et s’imposer parmi les grands de son temps: ni la naissance ni la richesse sont de son coté. De complexion délicate et souvent malade, le petit Augustin ne laisse pas non plus présager une carrière militaire. C’est son intelligence remarquable qui lui ouvre la porte des institutions les plus prestigieuses de son époque.
En juin 1811 arrive à Blois l’inspecteur général et conseiller de l’Université impériale: le haut fonctionnaire est en charge du recrutement pour l’École Normale, établissement qui avait été ressuscité par Napoléon en 1808. L’École accueille des élèves âgés au moins de 17 ans qui ont été choisis parmi les plus talentueux dans les lycées et dans les collèges de France. Augustin, né en 1795 et meilleur élève du collège de Blois, n’a que 16 ans, mais il parvient à impressionner l’inspecteur. Il obtient ainsi son dignus intrare, c’est-à-dire l’admission à l’École Normale. On peut encore lire l’arrêté de nomination parmi les fonds de la famille Augustin-Thierry préservés dans les Archives Départementales.
« Nous Louis de Fontanes, sénateur, Grand-Maître de l’Université … avons nommé et nommons élève de l’École Normale pour les Lettres M. Thierry (Augustin) né à Blois, le 10 mai 1795. »
Accueilli dans les locaux de l’École Normale sur la rue Saint-Jacques à Paris, Augustin obtient dans une seule année les diplômes de Bachelier tant pour les Lettres que pour les Sciences. Eux aussi sont conservés aux AD du Loir-et-Cher.
Une autre année s’écoule et Augustin, âgé désormais de 18 ans, reçoit le diplôme de licencié ès-Lettres.
Il est ainsi prêt pour commencer sa propre carrière dans l’enseignement. Le 29 septembre 1813, Louis de Fontanes signe l’arrêté qui nomme Augustin Thierry, élève de l’École Normale, régent provisoire de la Chaire de première de grammaire au Collège de Compiègne, en remplacement du titulaire M. Bélart.
Augustin n’y restera pourtant pas longtemps: les défaites de Napoléon s’accumulent et les avant-postes des armées ennemies avancent en France: Compiègne est évacuée en janvier 1814. Augustin regagne donc Paris où dépourvu des relations, en dehors de ces connaissances à l’École Normale, il médite un retour à Blois.
Ce ne sera pas ainsi: Claude-Henri de Rouvroy, comte de Saint-Simon et arrière cousin de l’auteur des Mémoires, l’avait déjà remarqué en 1812 et lui avait à plusieurs reprises proposé de travailler avec lui.
C’est dans le climat très incertain du printemps de 1814 que le comte de Saint-Simon renouvelle à Augustin sa proposition de l’engager comme secrétaire avec un salaire de deux cents francs par mois. Cette fois-ci, Augustin accepte. C’est sous l’aile d’un des derniers grands seigneurs et philosophes du XVIIIe siècles que le jeune homme achèvera son éducation.
G.V.